Francisco Ruiz de Infante and Jérôme Thomas |
Conservation, infidélité et déplacements dans une école d’art Plusieurs lignes de travail ont été activées au sein de l’ESADS en lien avec le projet digital art conservation. Au début il s’agissait d’un séminaire d’ordre analytique, mais petit à petit les résistances des étudiants autour de la notion de conservation dans un lieu de création, nous ont amené à interroger de façon pratique ce que ce terme hautement polysémique voulait dire, ainsi qu’à comprendre les conséquences que chaque sens possible allait porter si on l’inoculait sur une oeuvre d’art en train de se faire. Assez rapidement, nous nous sommes placés sur des terrains a priori assez éloignés, mais avec des problématiques de « perpétuité » étonnamment semblables : les arts numériques, les arts du temps et les arts vivants. Suite à deux questions : « Le concept d’une oeuvre est-il trahi si on change certains de ses ingrédients ? » et « à quel moment ? », une myriade de nouvelles interrogations ont nourri nos dialogues et actes. Les notions d’interprétation, de traduction, appropriation, reprise, réincarnation, remake, version, évolution, transposition, citation, remaniement, instrumentalisation et adaptation ont agité et complété celles de conservation, pérennisation, documentation et partition du début de nos réflexions. Ainsi, petit à petit, la complexe idée de « fidélité » (ou « infidélité ») a pris place. Tous ces déplacements (à manier avec précaution) nous ont permis d’inclure la problématique de la conservation dans le processus de conception et fabrication d’une oeuvre d’art et de la comprendre comme un acte de responsabilité qu’on ne doit pas déléguer. Le travail de Jérôme Thomas se déploie entre installations (souvent sonores), sculptures, vidéos et films, la ligne de partage qui traverse ces différents espaces est nécessaire pour en déterminer la nature. Par-delà leurs différences, qu’ils soient des récits, des objets ou des dessins, les travaux de Jérôme Thomas s’appliquent en effet à l’exploration d’un point de tension, celui où les choses ou les êtres chutent, se brisent, rompent et se dispersent. Il a montré son travail dans de nombreux lieux internationaux : Nasher Museum of Art de Duhram (USA), Nabi Arts Center de Séoul (Corée), espace CCF d’Hanoï (Vietnam), Musée des Beaux-Arts de Novossibirsk (Russie), Cinémathèque Française, Paris (France), Festival de Cannes, sélection à la quinzaine des réalisateurs (France), nef du grand palais, Paris pour l’exposition «Dans la nuit des images» (France), FRAC Champagne Ardenne (France)… Actuellement, il travaille à l’écriture d’un long-métrage et termine un catalogue DVD qui regroupe cinq films, édité par le centre national de création musicale Césaré. Il codirige l’atelier vidéo de l’ESAD de Strasbourg et dirige une société de production et post-production de film à Nancy. |